Pour cela, un secret : ne rien faire qui ne soit mis sous le regard de Dieu.
Nous devons lutter en permanence contre le risque de voir notre vie morcelée : un temps pour la vie familiale, un temps pour la vie professionnelle, un temps pour la vie sociale, un temps pour la vie spirituelle, etc. Ce qui peut faire en nous l’unité et l’union de tous ces temps ne peut être que la vie spirituelle, puisque nous sommes faits à l’image de Dieu.
Le temps que nous passons à travailler ne sera bien vécu que si nous y mettons notre coeur, au sens biblique du terme, cette part intime de nous-mêmes où la vie trinitaire de l’Amour peut s’épanouir pour notre plus grande joie.
Voyez la Sainte Famille.
Voyez la Sainte Famille. La mère admirable que Dieu se choisit pour s’incarner est en train de travailler quand l’Ange lui annonce la grande nouvelle. Bientôt, toujours à la demande de Dieu, le juste, le doux Joseph, héritier de race royale et humble travailleur manuel, la prendra chez lui et assurera par son labeur la subsistance de l’enfant-Dieu et de sa Mère.
Jésus lui-même va travailler, à temps partiel durant son enfance, à temps plein par la suite, apprenant puis exerçant le métier de menuisier-charpentier, en réalité un métier de constructeur et de bâtisseur polyvalent pour l’époque. Un métier dont le sens, la finalité, la beauté procuraient, au prix du labeur quotidien, des joies que l’on devine : méditons aussi sur l’action de grâce et la contemplation que procure le travail bien fait, joie que Dieu fait homme a partagé avec nous et qu’Il a inscrit dans la création.
Nous savons que Jésus ne faisait rien sans prier son Père. Et nul doute que la Sainte Famille a toujours totalement intégré le travail dans sa vie relationnelle avec le Père. Charles de Foucauld exprime cela de façon tout-à-fait profonde dans ses écrits :spiritualité du travail selon Charles de Foucauld.
Quand les moines prennent pour devise » Ora et Labora « , ils expriment à leur tour cette nécessité de faire du travail une occasion de prière, voire une prière.
» Laborem exercens » : le travail est au service de l’homme.
Dans Laborem exercens, le Pape Jean-Paul II rappelle qu’en premier lieu, le » travail est au service de l’homme » et non l’inverse. Cf Eléments pour une spiritualité du travail.
Comme Dieu est la Fin ultime de la personne humaine, cela signifie bien que le travail, au service de l’homme, contribuera à la rapprocher de Dieu. Parrallèlement, nous savons, par la Genèse, que le péché d’origine a fait de la mission confiée à l’homme de dominer la Création une activité qui, certes, lui permet de subsister, mais dans la peine et la transpiration.
Le travail, une punition?
Faut-il en déduire qu’il y a deux parties dans le travail, une qui est noble, où l’homme peut légitimement se sentir continuateur de l’oeuvre divine, et une autre qu’il faut subir comme une punition?
Pourtant, c’est bien dans notre monde tel qu’il est, marqué par le péché originel que Dieu est venu vivre et qu’Il a travaillé, manuellement jusqu’à 30 ans, et à l’évangélisation pendant trois ans. Cette sanctification du travail est passée par l’humilité et la joie, les croix discrètes du premier travail quotidien pendant des années. Mais pas par une déconsidération de ce travail, bien au contraire. Le seond travail était on ne peut plus noble, sa croix et sa gloire furent éclatantes.
Le travail, une sanctification.
Dès lors, notre chemin est tracé. Notre travail tout entier est pour la gloire de Dieu, qu’il soit créatif, valorisant, passionnant, ou qu’il soit répétitif, obscur à d’autres moments, qu’il soit scolaire, ménager, technique, artistique ou intelectuel, lucratif ou bénévole, il est toujours humanisant. Il est vrai qu’il nous arrivera parfois de crier » Eloï, Eloï, lama sabachtani », dans les épreuves liées au travail, aux relations de pouvoir, au chômage, à l’exploitation de l’homme par l’homme…
Il nous arrivera plus encore de chanter » Magnificat « , lorsque notre travail, ordonné à l’amour de Dieu et à l’amour du prochain, portera des fruits, nous procurant ces joies qui y sont attachées : fierté du travail bien fait, gagner sa vie, nourrir sa famille, transmettre son savoir, contempler un travail bien fait, faire du bien à travers son travail, être en communion avec Dieu et faire sa volonté à travers notre travail.
P. Y. Bonnet